Tout d’abord il faut savoir que la plupart de mes patients souffrent depuis de longues années et ont consulté beaucoup.
Mon travail va donc consister à demander au patient de me raconter la longue histoire de ses maux de tête et pourquoi il vient me voir.
J’ai beaucoup de temps à lui consacrer, donc je l’écoute longuement et au passage je reconnais quelques symptômes qui orientent un peu mon diagnostic.
Quand il m’a bien tout expliqué, je lui fais préciser certaines choses et je dis gentiment : « Maintenant c’est moi qui pose les questions ».
Je lui demande alors de me raconter : « la dernière fois que vous avez eu mal à la tête ».
Je fais préciser le jour, l’heure du début de la crise pour obtenir des réponses précises. Souvent le patient repart dans des considérations générales c’est pourquoi je l’oblige à retrouver des points de repère afin qu’il se remémore vraiment dans quelles circonstances cela se passait en lui disant par exemple : vous étiez où quand ça commencé ? Chez vous ? Au travail ? En weekend ?
Comment la douleur a-t-elle commencé, tout doucement ou bien avez-vous eu mal d’un seul coup ? Le patient répond alors avec ses mots à lui comme par exemple : » j’avais mal au réveil et la douleur est restée la même toute la journée ». Le fait d’avoir posé des questions précises l’oblige à dire exactement comment la douleur est apparue.
Je lui demande ensuite à quel endroit de la tête avez-vous eu mal ou avez-vous mal en ce moment? Il me montre ses arcades sourcilières, sa tempe, derrière la tête ou il me dit c’est toute la tête.
Et comment ça faisait mal ? Était-ce une douleur sourde ou plutôt aiguë, est ce que ça tapait comme si votre cœur battait dans votre tête, est ce que c’était profond ou superficiel ? etc…
Avec ces réponses à mes questions je commence à avoir une idée du diagnostic.
S’il s’agit d’une migraine, je me mets en devoir de lui faire un schéma pour lui expliquer ce que c’est que la migraine et comment on la soigne. S’il se reconnait dans mes explications c’est que je ne me suis pas trompée c’est bien d’une migraine qu’il s’agit.
S’il s’agit d’une céphalée de tension je lui explique ce que c’est, quelles en sont les causes et je l’adresse à un médecin spécialiste, neurologue ou ORL selon les cas, parfois les deux. Si nécessaire, je lui propose quelques séances de psychothérapie.
Enfin, pour préciser le diagnostic et pour qu’il comprenne, lui, comment fonctionnent ses maux de tête je lui donne un calendrier des douleurs à remplir tous les jours. Mais de cela je vous parlerai la prochaine fois.
Au cours de cette première consultation le patient va reconnaître beaucoup de ses symptômes et sortir de l’institut avec un premier bagage qui va le faire réfléchir.
Je dis souvent à mes patients avec un certain humour mais non sans autorité :
« Remplissez bien votre calendrier des douleurs car c’est mon meilleur médicament » En effet n’étant pas médecin je n’ai pas le droit de prescrire.
Mais le fait de s’observer en remplissant chaque jour son calendrier va aider mon patient à comprendre comment il fonctionne et cela va commencer à le déstresser, le stress de la douleur présente ou à venir étant à la fois la cause et la conséquence de la multiplication des migraines ou de la répétition quotidienne de la douleur dans une céphalée de tension.
Et pour moi, il faut absolument que j’arrive à poser le diagnostic et si le discours
spontané du début était riche d’informations et m’avait donné des pistes, il faut à présent les vérifier et surtout mieux connaitre le déroulement des douleurs.
D’où le calendrier des douleurs où l’on note chaque jour la date, l’heure du réveil et la note de douleur au réveil, l’heure et la douleur au déjeuner de midi, et au coucher. Et puis, à chaque fois que l’on prend un médicament, que ce soit pour les maux de tête ou pour autre chose, on écrit le médicament et on note l’heure à laquelle on l’a pris et la douleur que l’on avait à ce moment.
Quand le patient revient avec son calendrier des douleurs, soit le diagnostic est évident et simple à soigner je lui dis d’aller revoir son médecin traitant avec une lettre de ma part. Soit, le diagnostic nécessite un traitement spécifique, je l’adresse alors à un neurologue ou un ORL (la partie nez-gorge-oreilles fait bien partie de la tête), soit encore à tout autre spécialiste qui peut -être concerné) dentiste, psychiatre, endocrinologue, gynécologue, gastroentérologue, interniste etc.
Je ne conseille jamais d’aller chez l’ophtalmologiste, bien que les gens se plaignent d’avoir mal aux yeux, car je sais que le nerf ophtalmique est très concerné dans la crise de migraine, et je sais que ce n’est pas un problème d’appareil optique mais un problème de neurologie.